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1996-2018 © Patrick Pollefeys

Allemagne

Treize peintures murales de la rencontre des trois vifs et des trois morts sont présentement recensées en Allemagne. Pour un bref aperçu, visitez le site allemand Totentanz-Online. En Allemagne, les vivants portent toujours une couronne; par contre, ils chevauchent rarement leur monture. Les morts, couronnés une fois sur deux et parfois vêtus d'un linceul, ne sont jamais armés. Ils se montrent rarement agressifs, sauf dans cette gravure sur cuivre du Maître du Livre de raison, datant de la fin du 15e siècle.

Il existe quatre poèmes en langue allemande du dit des trois vifs et des trois morts. Dans le premier, Dis ist der welte lon1, trois rois en vie dialoguent avec trois rois décédés. Le texte s'accompagne d'illustrations rudimentaires où, curieusement, un seul des trois vivants ne porte pas de couronne. Un autre poème, celui de la bibliothèque universitaire de Hambourg, se distingue par son originalité. Trois rois à la chasse ont chacun une pensée pour leur père disparu. Soudain, trois cadavres apparaissent et les interpellent ainsi : "Nous sommes vos pères; nous fûmes ce que vous êtes, vous serez ce que nous sommes." Chaque mort prend la parole, puis chaque fils. Pour finir la discussion, chaque vivant reçoit un précieux conseil de feu son paternel. Cette apparition des aïeux se rencontre aussi dans les inscriptions accompagnant certaines peintures murales de l'Angleterre.

Vers 1424
Chapelle Jodokus, Überlingen. Dans cette fresque, les vivants sont représentés à pied. L'un d'eux tient un faucon, symbole de la chasse et attribut de la noblesse. Il est évident que les vivants appartiennent à la royauté: ils sont richement vêtus, et celui du centre porte un sceptre fleurdelysé. Les morts, eux, sont coiffés d'une couronne. Ils ne sont pas des ecclésiastiques, mais plutôt de repoussants doubles des vivants. Des vers sortent de leurs orbites creuses.

Fin 14esiècle
Jadis, la chapelle du Saint-Esprit, dans l'ancien hôpital de Wismar, s'enorgueillissait de sa rencontre des trois vifs et des trois morts. Hélas! Depuis, tous ses figurants ont perdu leurs jambes... Si les cadavres ont survécu au passage du temps, deux des trois cavaliers, situés sur un autre mur, ont disparu. Ici, les morts sont dépourvus d'attribut (ni linceul ni arme) et ne manifestent aucune agressivité. Ils lèvent tous la main en signe d'arrêt en une pose hiératique. L'unique vivant, semblant obéir à la demande, leur tend la main. Celui-ci est couronné: nous sommes donc en présence d'un roi et non d'un noble, contrairement à ce qu'on voit dans la plupart des œuvres du même thème en France. Aucun calvaire ne marque la frontière entre les deux mondes.

Fresque Wismar

Références
1 Wolfenbüttel, Herzog August Bibl., Cod. 16.17 Aug. 4°, Bl. 85v-87r, 14e siècle.