Titre Titre

English version

Copyright (textes)
1996-2018 © Patrick Pollefeys

Une autre conséquence du taux de mortalité élevé qu'entraînèrent les épidémies de peste fut la naissance d'un autre thème: celui du triomphe de la Mort. Alors que l'Allemagne et la France préféraient la danse macabre, l'Italie portait ses goûts vers ce nouveau genre. L'esprit égalitaire est toujours présent; comme dans la danse macabre et la légende des trois morts et des trois vifs, la Mort s'empare des riches comme des pauvres. Ici, la Mort n'est pas représentée dans une danse ordonnée, mais plutôt dans un combat furieux avec les vivants. L'issue de la bataille est sans équivoque; l'Homme sera vaincu par la Mort, c'est inéluctable.


Le triomphe de la Mort du Campo Santo à Pise
Triomphe de la Mort du Campo SantoAu Campo Santo de Pise, ce thème macabre fait partie d'un ensemble monumental qui comprend aussi une Rencontre des trois vifs et des trois morts, une Vie des pères du désert et un Combat entre anges et démons pour les âmes des morts. Malgré l'absence de quelques fragments, disparus lors d'un incendie en 1944, ce triomphe de la Mort est toujours en bon état. Les spécialistes attribuent cette œuvre, créée vers 1365, à Francesco Traini ou à Buonamico Buffalmacco.
Ce triomphe de la Mort est animé par 10 vivants (6 hommes, 4 femmes) insouciants. Certains jouent de la viole ou de la cithare, d'autres se parlent des yeux; une femme caresse son petit chien, deux hommes portent leurs faucons... Ce groupe ressemble grandement à la cavalcade de la rencontre des trois vifs et des trois morts. Contrastant avec ces heureuses gens, des mendiants, des vieillards, des infirmes et plusieurs cadavres empilés les uns sur les autres occupent la gauche du tableau. Au-dessus d'eux, la Mort avance, étrange et terrifiante. Il s'agit d'une figure féminine vêtue d'une longue robe, couronnée de cheveux blancs et ailée comme une chauve-souris. Dans ses mains, elle tient une immense faux, qu'elle brandit pour abattre les jeunes nobles insouciants, ignorant au contraire les désespérés de ce monde qui l'implorent de mettre fin à leurs souffrances. Cette œuvre porte un message bien cruel: la Faucheuse ne choisit pas toujours ceux qui la désirent. Certaines images proviennent de photos en noir et blanc prises avant l'incendie de 1944. Pour voir une photo couleur de cette peinture murale dans son intégralité, cliquez ici.

Le triomphe de la Mort de León
Triomphe de la Mort de LeónCertains auteurs avancent qu'une danse macabre est peinte dans la galerie ouest du cloître de Santa Maria de León (Espagne). Cette peinture murale, datant de la seconde moitié du 15e siècle et en mauvais état, s'apparente plutôt à un triomphe de la Mort. Il n'y a ni farandole ni ronde macabre dans cette œuvre. Sur la droite, on voit bien la figure allongée de la Mort. Elle est drapée partiellement d'un linceul, armée d'une hallebarde et munie d'un sablier qu'elle porte de sa main gauche. Son regard défiant scrute la foule qui se tient debout devant elle. À l'exception d'un cardinal qui occupe une bonne partie de l'espace gauche de cette peinture murale, il est difficile d'identifier avec précision les autres personnages. Au pied de la Mort, une scène biblique est peinte. Il s'agit du dernier épisode de la Passion du Christ, soit la Mise au tombeau, qui se déroule sous le regard éploré de Marie.

Le triomphe de la Mort de Clusone
Triomphe de la Mort de ClusoneCette fresque contient un imposant triomphe de la Mort auquel on a intégré des éléments de la légende des trois vifs et des trois morts. Sous le triomphe se trouve une danse macabre. Cette peinture murale attribuée à Giacomo Borlone date de 1485. Vous trouverez plus de détails dans la section danse macabre.

Les quatre Chevaliers de l'Apocalypse
Les quatre Chevaliers de l'ApocalypseExécutée en 1498, cette célèbre gravure sur bois d'Albrecht Dürer est la quatrième d'une série de quinze illustrant les révélations de St-Jean, qui prophétisait la fin du monde. L'ensemble a pour titre: l'Apocalypse. Dans les Quatre Chevaliers de l'Apocalypse, les cavaliers représentent, de gauche à droite: la Mort, la Famine, la Discorde (parfois interprétée comme la Pestilence) et la Guerre. Sous le regard d'un ange, les trois derniers écrasent hommes et femmes de diverses classes sociales avec leurs puissantes montures, alors que la Mort sous les traits d'un vieille homme rachitique sur son cheval squelettique projette un évêque dans la bouche d'un dragon sorti des entrailles de la Terre. Nous ne sommes pas devant une scène de bataille, mais devant une destruction furieuse et impitoyable.
Une caractéristique inhabituelle des gravures de l'Apocalypse est l'absence de texte dans les illustrations, ce qui conserve la puissance expressive de l'œuvre (le texte étant imprimé au verso). L'Apocalypse a été publiée par Dürer sans l'aide d'un mécène. Il a conçu, gravé et édité lui-même cet ouvrage paru en deux versions simultanées, une en allemand, l'autre en latin. Il s'agissait d'une première à l'époque.

La Mort triomphante
La Mort triomphanteCe dessin couleur sur parchemin d'un maître anonyme du début du 16e siècle montre la Mort avec un arc et une flèche dans ses mains tendues, triomphant sur le genre humain. À ses côtés se tiennent un homme et une femme à moitié nus. À ses pieds gisent pêle-mêle les représentants des classes cléricale et laïque, comme ceux des arts et des sciences - pape, cardinal, évêque, abbé et curé; empereur, roi, comte, gentilhomme, soldat et paysan; savant, usurier, peintre, musicien et enfant.

Le triomphe de la mort
Triomphe de la Mort Dans cette vision de fin du monde, peinte par Pieter Bruegel le Vieux vers 1562, la Mort est au centre du tableau. Elle est armée d'une faux et chevauche une monture décharnée. Elle pousse des Hommes dans une caisse dont la porte est marquée d'une croix - manifestement une trappe... Une horde de squelettes inonde ce paysage; ils fauchent tous les Hommes sans exception, le roi comme la mère et son nourrisson, le chevalier comme les belles dames, le paysan comme le couple d'amants qui jouent de la musique sans remarquer la présence d'un squelette derrière eux. Des joueurs de cartes se défendent à coups d'épée; ils n'ont pas compris que toute résistance est futile. Le paysage reflète cette mort: les arbres et l'herbe sont desséchés, derrière les collines un feu infernal flambe, partout des squelettes massacrent des humains, par noyade, par pendaison, par égorgement. Un homme sur le point d'être décapité prie en vain, son chapelet dans les mains; toute promesse de rédemption ou de résurrection est absente de ce tableau. Des squelettes sonnent le glas, il n'y plus d'espoir.Cliquez le lien suivant pour une image en haute résolution.

La Mort triomphante
Triomphe de la MortCette Mort triomphante d'Alfred Rethel fait partie d'une série de gravures intitulée Une autre danse macabre de l'année 1848. Danse macabre qui en fait n'en était pas véritablement une, la Mort ne formant pas un couple avec un individu; la gravure porte bien son nom de «Mort triomphante». Devant les ruines d'une maison, la Mort montée à cheval se promène. À ses pieds, des hommes agonisent sur leur barricade que l'armée, à droite, vient de canonner. À gauche, une femme et un enfant pleurent, sans doute la perte d'un mari et père. œuvre inspirée par la répression sanglante de la révolution de 1848, elle représente la Mort comme chef de file et seul vainqueur de ce combat. Rethel avait ressenti la révolution comme une sorte de danse de la Mort, de la même façon que des artistes jadis avaient vécu la peste. Le cycle eut un immense retentissement, tant à l'étranger qu'en Allemagne.

La Mort égorgeuse
La Mort égorgeuse Gravé par Alfred Rethel en 1851. Il n'y a pas que la peste qui ait fourni une occasion pour la création d'un nouveau genre artistique; au 19e siècle, une autre plaie recouvrit l'Europe en vagues: le choléra. Rethel dessina La Mort égorgeuse, en fit plus tard une gravure sur bois très populaire, à partir d'un récit que le célèbre poète Heinrich Heine avait fait de l'émergence soudaine de l'épidémie de choléra en l'an 1832, pendant un bal masqué du carnaval de Paris. La Mort y joue d'une sorte de violon, pendant que les musiciens fuient. Près d'eux, une silhouette féminine décharnée, enveloppée d'un suaire: symbole de la maladie. Au premier plan, des fêtards ont déjà succombé au fléau.